Tamerlan, la route de la Soie et quelques autres choses sur l'Ouzbékistan

Moscou (AFP) - L'Ouzbékistan, longtemps un point de passage obligé de la Route de la soie entre l'Europe et la Chine, est dans l'incertitude après l'annonce vendredi de la mort de son président Islam Karimov, au pouvoir pendant plus d'un quart de siècle. Voici quatre choses à savoir sur le plus peuplé des pays d'Asie centrale.

 

- Le pays de Tamerlan -

Si l'Ouzbékistan moderne n'a acquis son indépendance qu'en 1991, sa naissance remonte à l'époque de Tamerlan (1336-1405), considéré comme le père fondateur de la nation ouzbèke, du nom d'un peuple turcophone. Souvent comparé à Gengis Khan, ce chef de guerre cruel né près de Samarcande, capitale d'une région où différentes tribus se livraient des guerres sans merci, est proclamé roi en 1370.

Il conquiert alors l'Asie centrale, étendant son royaume jusqu'aux territoires de l'Inde, du sud de la Russie et de laTurquie actuelles. Mais s'il a laissé son nom dans l'histoire par ses conquêtes militaires et la terreur qu'il inspirait, il n'a jamais pu créer un Etat viable et son empire a disparu avec sa mort.

La mémoire de Tamerlan, enterré à Samarcande (sud-est de l'Ouzbékistan actuel), est célébrée après l'indépendance par les autorités, qui cherchent à créer un sentiment national dans un pays marqué par 150 ans de domination russe puis soviétique.

 

- Au cœur du 'Grand jeu' -

Pendant des siècles, l'Ouzbékistan fut un point de passage de la Route de la soie, ces pistes caravanières traversant l'Asie de la Chine aux rives de la Méditerranée.

Mais au début du XIXe siècle, l'Asie centrale est encore indépendante de toute puissance coloniale quand la Russie et la Grande-Bretagne entament une lutte d'influence pour son contrôle. C'est le "Grand jeu", qui verra la création de l'Afghanistan sous domination britannique tandis que l'Empire russe crée un ensemble administratif appelé Turkestan, regroupant les Turkménistan, Tadjikistan,Kirghizstan et Ouzbékistan actuels.

L'Ouzbékistan est aussi au coeur de luttes d'influence entre la Russie et les Occidentaux. Jusqu'en 2005, il héberge une base militaire des Etats-Unis utilisée pour le ravitaillement des troupes américaines en Afghanistan, l'Allemagne ayant aussi un aéroport à Termez (sud).

Pays musulman, l'Ouzbékistan a aussi été le théâtre d'attaques perpétrées par des islamistes radicaux. Le Mouvement Islamique d'Ouzbékistan y a commis desattentats au début des années 2000. Aujourd'hui, de nombreux Ouzbeks combattent dans les rangs de l'organisation Etat islamique (EI) en Irak et en Syrie.

 

- Le coton et le tourisme -

Le coton, dont l'Ouzbékistan est un des cinq plus gros exportateurs mondiaux, lui rapporte chaque année plus d'un milliard de dollars (895 millions d'euros) et les autorités espèrent en produire 3,3 millions de tonnes en 2016. Le textile concentre un tiers des emplois industriels de ce pays, le plus peuplé d'Asie centrale avec 31 millions d'habitants.

L'Ouzbékistan est fréquemment accusé de travail forcé dans ses champs de coton, même si l'Organisation internationale du travail (OIT) a salué en 2014 les mesures prises en vue d'éliminer le travail des enfants.

Si ce pays exporte aussi de l'or, dont il est le 8e producteur mondial, il mise beaucoup sur le tourisme pour se développer. Samarcande, classée depuis 2001 au patrimoine mondial de l'Humanité, fait la fierté des Ouzbeks pour ses édifices époustouflants, comme la place du Régistan encadrée de trois universités des XVe et XVIIe siècles.

 

- Désastres écologiques -

La culture intensive du coton depuis plusieurs décennies a provoqué un désastre écologique. Fin 2014, l'Ouzbékistan a même demandé et obtenu une importante aide internationale pour faire face à la disparition de la mer d'Aral. En 50 ans, elle a perdu 75% de sa superficie à cause du détournement de rivières l'alimentant pour irriguer les cultures de coton.

Cette quatrième plus grande mer intérieure du monde, à cheval sur l'Ouzbékistan et le Kazakhstan, semble provisoirement sauvée grâce à un barrage construit dans sa partie kazakhe mais les problèmes de santé causés par les pesticides déversés dans les champs de coton et les dérèglements climatiques engendrés par la quasi-disparition de la mer d'Aral demeurent.

Et l'eau demeure une source potentielle de conflit dans la région : l'Ouzbékistan, qui dépend de l'eau en provenance du Tadjikistan voisin, s'oppose fermement à un projet de barrage dans ce pays. Au point qu'Islam Karimov a prévenu des risques de guerre s'il était mis en oeuvre.

 

 

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